Pour convaincre les sceptiques et les curieux

Vous trouverez ci-dessous des liens vers une variété d’articles, de reportages et d’études scientifiques qui m’ont semblé particulièrement dignes d’intérêt. La plupart ont été publiés par des sources qui sont (généralement) considérées comme étant fiables. Ils portent tous directement ou indirectement sur l’art de la mémoire. Aucun de ces liens n’est essentiel. À vous de voir ce que vous souhaitez consulter ou ignorer. Je les ajoute ici principalement dans l’espoir d’éveiller votre curiosité et de donner un peu plus de crédibilité à mes propos.

Quelques articles et reportages passionnants portant sur l’art de la mémoire

  • “An Ancient and Proven Way to Improve Memorization” est le titre d’un excellent article du New York Times portant sur les palais de mémoire et sur la science qui explique comment ils fonctionnent.
  • “Eleven teams, mostly from world-leading neuroscience laboratories, took part in the challenge of designing the ultimate system for learning 80 Lithuanian words in an hour. Around 10,000 participants were funnelled through the competing methods in the finals, giving the results a level of statistical power that cognitive scientists can normally only dream of.” La méthode gagnante: des palais de mémoire, des mots-clés et de la “retrieval practice”. Article publié dans The Guardian.
  • Reportage de CNN réalisé suite à la publication d’une étude qui a fait le tour du monde en 2017. L’étude démontre comment de complets débutants peuvent transformer leur cerveau et spectaculairement développer leur performance à s’entrainant 20 minutes par jour pendant 6 semaines à l’utilisation des palais de mémoire. Les performances doublent en moins de deux semaines. Le reportage est en trois parties: première, deuxième et troisième. Les deux dernières parties sont de loin les plus intéressantes.
  • Encore dans le New York Times, un long et fascinant article qui présente le contenu du livre Moonwalking with Einstein, l’ouvrage qui m’a initié au sujet en 2015.
  • Les palais de mémoire ne sont pas une invention récente. Ils étaient jadis enseignés et utilisés par un important pourcentage de la population. Cet article est un bon portrait de l’histoire du sujet.
  • Cet article en français sur le blogue du journal le Monde explique de quelles façons, contrairement à ce qu’on peut souvent entendre, les techniques de mémorisation ne datent pas de la Grèce antique. Elles ont été systématiquement utilisées, par nécessité et par plaisir, par toutes les sociétés sans écriture. Les prouesses de mémorisation de nombreux chasseurs cueilleurs sont à bien des égards supérieures aux miennes et à celles des soi-disant “champions de mémorisation” actuels. C’est là un fait qui me semble incroyablement intéressant et lourd de conséquences. Comprendre cela devrait être incontournable pour tous ceux et celles qui s’intéressent à la psychologie et à l’histoire de l’humanité.
  • Article du Globe and Mail sur les exploits qu’accomplissent tous les jeunes qui fréquentent cette école en Mongolie.
  • Article dans The Guardian démontrant comment il est possible d’apprendre 1000 mots d’une langue étrangère en une série de courtes pratiques qui au total ne durent que 22 heures. L’article est excellent, mais ignorez svp son titre et la phrase qui le suit. Comme c’est trop souvent le cas, ils semblent avoir été choisis non pas par l’auteur, mais plutôt par un éditeur pressé et bien peu scrupuleux.
  • Sympathique reportage montrant comment un complet débutant peut utiliser un palais de mémoire pour retenir dans l’ordre la liste de 83 récipiendaires de l’oscar du meilleur film.
  • Surprenante petite étude dont les résultats mériteraient d’être davantage connus. De complets débutants qui improvisent très rapidement de petites histoires parviennent ensuite à se souvenir de pas moins de 93% de 12 listes de 10 noms communs chacune. Les sujets du groupe contrôle qui eux utilisaient seulement la concentration et la répétition ne se sont souvenu que de 13% de ces mêmes listes. 93% de rétention versus seulement 13%! De complets débutants qui font cela rapidement pour la toute première fois! Ce n’est pas une petite différence! Je suis d’accord pour souligner le fait qu’on ne parle ici que de simples listes de noms communs et qu’on ne peut pas nécessairement s’attendre à des effets aussi spectaculaires dans tous les contextes. Le fait que les chercheurs fournissaient d’abord le premier mot de chaque liste avant de demander aux participants de réciter le reste est également digne de mention. Mais tout de même, ces résultats sont époustouflants et devraient être largement connus.
  • Longue liste d’études scientifiques portant sur l’efficacité des techniques de mémorisation.

À quoi ça sert?

Je reste encore aujourd’hui souvent surpris par la fréquence à laquelle des questions du type “à quoi ça sert?” sont lancées. Tellement que j’ai ressenti le besoin d’écrire ce petit article un peu grognon pour leur répondre.

La réponse courte est la suivante. Les techniques de mémorisation, lorsqu’elles sont utilisées correctement, peuvent rendre presque facile et amusant le plus aride des sujets. Elles ne visent pas à remplacer l’apprentissage “normal”, mais plutôt à le faciliter et l’accélérer. Elles ne sont bien sûr pas toujours nécessaires. Plus nous sommes familiers avec un domaine, plus il devient facile de continuer de développer nos connaissances sur le sujet en question. L’apprentissage devrait d’abord se faire par l’application réfléchie de notre attention, par des associations directes, par la logique, par la compréhension et par notre mémoire naturelle. L’une des meilleures façons de favoriser ce type d’apprentissage consiste à, une fois que les principaux fondements ont été saisis, fermer ses livres et tenter d’expliquer, à soi-même ou idéalement à quelqu’un d’autre, dans sa tête ou préférablement à voix haute ou à l’écrit, ce que nous venons d’apprendre. Mais pour toutes les informations qui sont plus difficiles à retenir, ce qui peut être beaucoup ou bien peu de choses selon l’individu et selon le sujet, les techniques de mémorisation peuvent venir apporter une aide inestimable.

Lorsque les techniques de mémorisation commencent à être utilisées de façon plus systématique, on parle alors d’un “art de la mémoire”. À mon avis, les principaux bénéfices de l’art de la mémoire sont les suivants. Le premier est incontestable, les suivants sont communément rapportés, le dernier est davantage spéculatif.

  • Une fois familiarisé avec les techniques de base, la mémorisation de connaissances déclaratives devient plusieurs fois plus facile qu’elle ne l’aurait été autrement.
  • Au lieu d’être pénible, la mémorisation devient amusante.
  • Plus grande facilité à faire des associations rapides et à utiliser sa créativité.
  • Plus grande habileté à rester concentré sur une tâche.
  • Plus grande confiance en soi résultant du développement d’une nouvelle habileté.
  • Facultés accrues pour la visualisation mentale, une habileté qui peut être transférée dans d’autres domaines.

Est-ce que c’est difficile?

Parfois oui, parfois non. Des exercices simples comme la mémorisation de série d’images ou de noms communs peuvent être très bien réussis du premier coup par de complets débutants. Et les exercices que je vais animer et diriger en compagnie de divers groupes de curieux sont essentiellement toujours des succès. 

Mais ce n’est pas aussi simple lorsqu’on commence à s’attaquer de façon autonome à du matériel plus difficile. Cela n’a rien de surprenant. À part peut-être mâcher de la gomme, toutes les habiletés requièrent une certaine période d’adaptation avant de pouvoir être mises en pratique de façon efficace. L’art de la mémoire apporte plusieurs bénéfices immédiats, mais la plupart viennent après quelques heures de pratique. Notez cependant que le ratio efforts nécessaires versus bénéfices escomptés est à mon avis l’un des meilleurs qui soit, surtout pour des étudiants. Il faut beaucoup de pratique pour réussir à mémoriser un jeu de cartes en quelques secondes, mais il n’en faut que relativement peu pour pouvoir être à l’aise avec la plupart des tâches de mémorisation plus “normales”. La grande majorité des bénéfices de la pratique peuvent être obtenus avec une petite fraction des efforts qui sont investis par les compétiteurs les plus sérieux. Ne faites pas l’erreur d’abandonner si initialement l’utilisation des techniques de mémorisation vous semble difficile, car cette impression n’est que temporaire. C’est comme si vous tentiez de faire du ski pour la première fois de votre vie. Vous pouvez descendre la pente, mais c’est difficile, effrayant, épuisant et inconfortable. Mais si vous persévérez ne serait-ce que quelques minutes par jour durant quelques semaines, votre cerveau va se transformer de façon subtile et l’exercice va devenir plus facile, plus rapide, plus agréable et plus efficace. Une fois cette compétence de base atteinte, ce sera à vous de voir si vous souhaitez uniquement vous concentrer sur l’apprentissage à long terme, revenir à vos anciennes habitudes ou encore pousser l’exercice plus loin.

Un appercu incomplet des progrès à venir:

Voici les résultats moyens obtenus par des volontaires sans expérience préalable à un exercice de mémorisation de mots aléatoires en 5 minutes. Après 20 minutes par jour à s'exercer avec des palais de mémoire, leurs résultats moyens ont plus que dou…

Le graphique que vous venez de voir montre les résultats moyens obtenus par des volontaires sans expérience préalable à un exercice de mémorisation de mots aléatoires en 5 minutes à l’aide de palais de mémoire. Les volontaires se sont entrainés pendant 30 minutes par jour sur une période de 40 jours. Une vingtaine d’heures de pratique au total. Notez comment les résultats moyens ont plus que doublé durant les deux premières semaines, après seulement 7 heures de pratique.

J’aime comment ce graphique compile les résultats de nombreux individus et prouve certains des bénéfices de la pratique. Je pense aussi qu’il est très incomplet, que la réalité derrière est à bien des égards encore plus enthousiasmante.

  • S’entrainer 30 minutes par jour pendant 6 semaines, c’est très bien, mais je doute fort que ce soit absolument nécessaire. Je pense que je n’ai jamais maintenu ce rythme bien longtemps. Je pense que des résultats comparables pourrait être obtenus avec des exercices plus brefs. Je serais aussi bien curieux de connaitre les résultats si les mêmes 20 heures de pratique avaient été étalées sur une plus longue période.
  • Notez que ces résultats sont compilés à l’aide d’un site (Memocamp.com) où les mots sont souvent bien difficiles et il faut pratiquement avoir 100% de bonnes réponses pour avoir ses points. Un volontaire qui mémorise 60 mots en faisant quelques erreurs peut facilement voir son score final être réduit à moins de 10. Avec des tests où les erreurs seraient permises, je ne sais pas à quel point les résultats auraient été encore meilleurs.
  • Je pense également que les progrès seraient encore bien plus spectaculaires si l’on avait mesuré la capacité à mémoriser durant des périodes de 15 minutes ou de 30 minutes plus plutôt que de seulement 5. Plus les quantités d’information à mémoriser sont importantes, plus la méthode de la simple répétition et du “bourrage de crâne” montre ses limites et plus les avantages des techniques de mémorisation sont évidents.

L’étude dont est tirée ce graphique est disponible ici. Le graphique en question se trouve dans les “supplemental information” ici. Vous trouverez au début de cette page des liens vers des reportages et articles de journaux de par le monde qui discutent des implications de cette même étude.

Je reproduis ce graphique ici seulement comme une illustration parmi d’autres des progrès qui sont possibles. L’intérêt n’est pas principalement de pouvoir mémoriser un plus grand nombre de mots en 5 minutes, c’est surtout de développer des compétences de base qui pourront vous être utiles dans plus ou moins n’importe quel contexte!